10 octobre 2022

L’attractivité des carrières de l’enseignement et de la recherche universitaire a récemment bénéficié de la loi du n°2020-1674 du 24 décembre 2020 (dite loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 – LPR) qui a revu les régimes des primes des enseignants chercheurs.
Le décret n°2021-1895 du 29 décembre 2021 a créé le régime indemnitaire des personnels enseignants et chercheurs (RIPEC), constitué de 3 composantes qui ne s’appliquent pas en totalité aux personnels hospitalo-universitaires (cf. détail des primes en Annexe).
1. Quelle est cette nouvelle prime ?
La composante « C1 » liée au grade – dite également statutaire – est attribuée aux enseignants-chercheurs universitaires (les mono-appartenants), mais pas aux hospitalo-universitaires (HU) de l’établissement. C’est une anomalie, voire une discrimination, compte tenu de l’implication statutaire des HU au niveau de l’enseignement et de la recherche.

Pour compenser cette anomalie, le MESRI, plutôt que d’aligner enfin la prime des HU sur celle des mono-appartenants, a institué cette nouvelle « prime d’enseignement supérieur et de recherche (PESR) » des membres du personnel titulaire enseignant et hospitalier (Décret no 2022-1252 du 23 septembre 2022) qui se veut un équivalent de la prime statutaire (dite C1). Cette prime est attribuée aux personnels « qui participent à l’élaboration et à la transmission des connaissances médicales, pharmaceutiques et odontologiques ainsi qu’au développement de la recherche dans ces domaines ».

Cette prime PESR, apparue au décours du Ségur de la Santé – et présentée comme facteur d’attractivité – n’a pas été validée par Alliance-Hôpital : nous nous sommes insurgés quant à son montant, et ses conditions d’attribution (taux variable : 33%, 66 % ou 100 % et dossier de demande complexe) qui ne constituent pas un facteur d’attractivité. Son montant annuel s’échelonne de 238 à 714 € pour 2022 (montant qui devrait croitre jusqu’en 2027 pour atteindre environ 2000 € au taux maximum). Par comparaison, pour les personnels mono-appartenants, la prime statutaire annuelle a été de 2 800€ en 2022 (et ce montant en 2027 sera de 6400 €).

2. Quelle est la signification de cette nouvelle prime ?
Il y a plusieurs différences majeures entre cette prime et la prime statutaire dont bénéficient les personnels mono-appartenants :
– Son montant très inférieur (environ 3 fois inférieur) ;
– Sa gradation avec 3 niveaux possibles (33 % – 66 % et 100 %) ;
– L’obligation pour en bénéficier de déposer un dossier complexe, car la prime nécessite un avis du conseil d’UFR qui atteste de l’accomplissement des obligations de services universitaires (en fonction de la charge d’enseignement et de recherche exercée).
Cette prime PESR appelle quelques commentaires de la part d’Alliance-Hôpital :
La prime statutaire dite C1 des personnels mono-appartenants est pertinente pour l’attractivité de ces métiers. Mais ce qui est proposé comme « équivalent » pour les personnels HU n’améliorera pas l’attractivité de leurs carrières.
1 – Le montant :
Pourquoi une telle différence dans son montant –vis-à-vis de nos collègues universitaires mono-appartenants quand, au-delà des activités d’enseignement classiques, sur site universitaire et sur site hospitalier, l’implication des personnels HU se trouve très augmentée avec la mise en place et le suivi des étudiants de 3eme cycle (qui concerne toutes les disciplines médicales, odontologiques et pharmaceutiques). Nous demandons son alignement sur celle des mono-appartenants. Par ailleurs, sur le fond, cette prime différenciée entre hospitalo-universitaires et universitaires nous semble constituer une rupture du principe d’égalité et nous nous réservons le droit de faire un recours devant le Conseil d’État contre le ministère de l’enseignement supérieur.
2 – Les modalités d’attribution :
A la différence de la prime statutaire des mono-appartenants, l’attribution de la prime PESR pour les HU nécessite de renseigner un « compte-rendu d’activité d’enseignement et de recherche » (avec 2 pages d’items détaillés dans le JO, ce qui le rend aussi fourni qu’un dossier de demande de promotion au CNU !).

Elle est soumise à l’avis du conseil d’UFR, ce qui inclura les étudiants et les personnels BIATSS qui vont donner un avis sur la charge d’enseignement et de recherche des collègues, alors qu’un avis en formation restreinte aux HU (comme c’est le cas pour les avis des promouvables) aurait été suffisant. A un moment où se pose le problème crucial de l’attractivité de la carrière hospitalo-universitaire, est-il raisonnable de demander aux collègues HU de trouver le temps de renseigner un dossier long et tatillon et de mobiliser nos conseils d’UFR pour analyser et classer ces demandes dont on nous dit qu’elles devraient, sauf situations exceptionnelles, être généralisées à quasiment tous les collègues ?

Quel est ce signal adressé à nos jeunes et futurs collègues HU avec une prime si indigente et si complexe ? Certainement pas celui de l’attractivité !

La CMH et le SNAM-HP, syndicats représentatifs réunis sous la bannière d’Alliance-Hôpital, rappellent la nécessité d’un traitement juste et équitable pour les HU. Ils demandent une vraie revalorisation à la hauteur des responsabilités et des services rendus. Le malaise est profond et ancien, et les impératifs de la démographie à venir où près du quart des enseignants vont partir à la retraite dans les 5 ans font qu’il ne faut plus tergiverser devant l’étendue des défis à venir. C’est simplement tout l’avenir de la médecine hospitalière qui est en jeu. Il ne sera certainement pas réglé par cette nouvelle prime de 60 € mensuels…

Pr Pascal le Corre, SNPHPU & CMH
Pr Sadek Beloucif, Snam-HP
Pr Jean-Pierre Pruvo, SRH & Snam-HP

Références :
Décret no 2022-1252 du 23 septembre 2022 relatif à la prime d’enseignement supérieur et de recherche du personnel titulaire enseignant et hospitalier NOR : ESRH2217793D
(https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046325749)
Arrêté du 23 septembre 2022 relatif au compte-rendu d’activité d’enseignement et de recherche pour l’attribution de la prime d’enseignement supérieur et de recherche des membres du personnel titulaire enseignant et hospitalier NOR : ESRH2221826A
(https ://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046343809)
Arrêté du 23 septembre 2022 fixant les taux de la prime d’enseignement supérieur et de recherche des membres du personnel titulaire enseignant et hospitalier NOR : ESRH2217798A
(https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046325775)
Annexe : les différentes primes

1 – composante C1 liée au grade, dite également composante « statutaire »
Elle est due à tous les enseignants-chercheurs et chercheurs qui accomplissent leurs missions. Pour bénéficier de cette composante, les enseignants-chercheurs doivent avoir accompli l’intégralité́ de leurs attributions individuelles de service (soit 192 heures équivalent TD).

Elle remplace à compter de 2022, les actuelles primes de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) (décret n°89-775 du 23 octobre 1989). L’arrêté du 29 décembre 2021 porte pour 2022 la part statutaire à 2 800€ par an et sera progressivement revalorisée pour atteindre 6400€ par an. Cette prime est attribuée aux enseignants chercheurs universitaires mais pas aux hospitalo-universitaires de l’établissement.

2 – composante fonctionnelle C2 liée à l’exercice de certaines fonctions ou de certaines responsabilités particulières.
Pour bénéficier de cette composante les enseignants-chercheurs doivent exercer les fonctions ou responsabilités concernées en sus de leurs obligations de service. Elle donne lieu à une indemnité liée à l’exercice de certaines fonctions ou responsabilités particulières confiées aux enseignants-chercheurs ou chercheurs. Elle remplace les primes de charges administratives (PCA), primes de responsabilités pédagogiques (PRP).

Le montant est plafonné selon les groupes de fonctions ou niveau de responsabilité :
Groupe 1 : Responsabilités particulières ou missions temporaires : montant annuel maximum de 6 000 €
Groupe 2 – Responsabilités supérieures : montant annuel maximum de 12 000 € ;
Groupe 3 – Fonctions de direction : montant annuel maximum de 18 000 €.
Aucun dossier ne doit être déposé par les personnels enseignants-chercheurs pour obtenir cette indemnité.

Cette prime peut être attribuée aux enseignants chercheurs universitaires et hospitalo-universitaires de l’établissement.

3 – composante individuelle C3 sous la forme d’une prime dont les agents doivent faire la demande et qui est liée à la qualité des activités et à l’engagement professionnel.

Cette prime est amenée à remplacer au 1er janvier 2022 la prime d’encadrement doctoral et de recherche (PEDR).
Elle est attribuée sur dossier après avis de la section du CNU dont relève l’enseignant chercheur puis de l’avis du Conseil Académique.
Cette prime peut être attribuée aux enseignants chercheurs universitaires et hospitalo-universitaires de l’établissement.